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jeudi 10 août 2017

Xtreme Fest Albi 1er jour 28 juillet 2017

À sa cinquième édition, l'Xtreme Fest est devenu le gros festival Metal-Punk-HardCore du Midi. Le lieu est assez central par rapport à cette aire géographique, mais plus difficile d'accès tout de même depuis la Méditerranée : je vous passe l'interminable trajet à travers la montagne, en guise d'introduction à l'esprit plutôt rural du rendez-vous. L'identité d'un festival tient en grande partie au site, en l'occurrence la vaste ancienne mine à ciel ouvert de Carmaux, point historique de la région depuis plusieurs siècles, connu notamment pour ses grévistes soutenus par Jaurès en son temps. C'est désormais une base de loisirs, avec son lac artificiel accessible en tyrolienne, au fond du large entonnoir creusé par des générations de mineurs. Une maison de la musique, sur le rebord de la déclivité, offre un accueil idéal pour ce type d'événements.

Ceux qui me suivent depuis longtemps ont remarqué que je n'étais pas trop amateur de festivals, mais en plus de la proximité spatiale, l'Xtreme Fest a l'avantage d'avoir une ville touristique proche (la belle Albi) avec un parc hôtelier à l'avenant pour les douillets comme moi ou les VIP – je crois bien avoir croisé l'ancienne direction de feu Holy Records à l'hôtel. Et surtout, il demeure un festival à dimension familiale : les groupes ne jouent pas en même temps, les deux scènes sont proches dans un périmètre compact mais pas étouffant, dont on peut sortir et rentrer aisément de toute façon. Néanmoins, une forte présence policière à quelques encablures du fest' rappelait que nous avons dorénavant changé de monde.
La programmation, enfin, reflète l'identité du public méridional, encore bien friand de Punk et de HardCore. La cohabitation des rebelles festifs avec les Metalleux avides de belles affiches estivales permet à ce festival d'exister, en mêlant ces publics dans la lourde chaleur de la campagne albigeoise, dès le vaste camping situé de l'autre côté de la bordure de la mine. Moi, je ne revenais cette année que pour le premier jour dont le programme me paraissait de loin le mieux. En plus, le parking visiteurs est beaucoup plus proche que le camping… et je ne voulais pas risquer de revivre l'orage que j'avais mangé en pleine nuit l'an dernier quand je traversais le bois pour y arriver !

À faire un seul jour il faut le faire bien et arriver pour l'ouverture. Une fois récupéré le bracelet et quelques jetons à convertir en boisson, les précoces pouvaient profiter des Coreux de TEN YEARS TOO LATE à qui revenait d'inaugurer l'édition, dans le contexte compliqué d'une scène extérieure pour un parterre encore maigre en plein cagnard. Originaires d'Albi, l'émotion se sentait dans les propos de leur chanteur mais ils ne se sont pas laissés déborder par l'enjeu. Leur HardCore Punk oscille entre les gros riffs East Coast et les passages mélodiques plus rapides à la Californienne, avec quelques cris quand il le faut. Les accélérations étaient encore limitées mais tout le set fut joué dans le tempo, ce qui est préférable, à choisir. C'était assez honnête pour encourager à persévérer. L'esprit de l'Xtreme Fest était déjà là.

Le premier déplacement vers la salle intérieure et sa fraîche pénombre salutaire, avec un public de mieux en mieux garni, était pour aller entendre GUILLOTINE, un autre groupe local (toulousain ou tarnais je n'ai pas saisi) encore bien plus jeune. Les cinq membres, dont trois filles, font du Death Old-School. Chic ! Avec un gros son propre et le growl, pitché sans effort mais parfait, de la chanteuse échappée d'un cosplay noir, ça partait pas mal. Quelques passages semi-acoustiques s'intercalaient assez longuement, mais manquaient d'âme. La chanteuse laissait la communication à son guitariste. Le public réagit, mais plus pour délirer que pogoter, jusqu'à ce circle-pit commencé comme une ronde main dans la main. Il faut dire que le mid-tempo gras et encore un peu intimidé ne se prêtait pas au déchaînement complet. Et surtout, les effets se révélaient souvent trop appuyés, révélant un collectif qui a encore besoin de se rassurer dans ses choix stylistiques en recourant à ses clichés sonores les plus caricaturaux (growl excessivement prolongé entre autres). Il y a encore une grosse marge de progression sur ces bases, mais un potentiel quand les traits typiques du jeune combo disparaîtront.

Comment être objectif avec les compères Montpelliérains de TERROR SHARK ? C'était la première fois que le trio abordait une aussi grosse scène, mais ils ont dévoré l'enjeu avec la férocité des grands blancs. Leur Crossover Thrash HC old-school fortement inspiré par MOD et DRI a profité d'un excellent son donnant toute la puissance voulue à la batterie, et restituant les riffs avec toute la précision qui est aujourd'hui atteinte après deux années à croiser plutôt dans des caves. Le pit se forma vite et atteint enfin une digne ébullition, le premier pogo à fond du festival. Les deux requins gonflables jetés aux moshers rendaient l'exercice assez drôle et quand ils volaient en l'air, créaient un côté sharknado surréaliste parfaitement recherché. Le chanteur Jérôme et quelques motivés s'offrirent des virées sur les mains tendues de la fosse (marine) captivée, avec la mini-planche estampillée en gros "MOSH" brandie comme un slogan à d'autres moments. Ce style longtemps regardé comme désuet s'offre un retour, et démontrait son efficacité, et même un certain esthétisme, aussi basique soit-il. Il n'y avait qu'à voir les sourires émergeant du mosh pit en fusion. Cela fait plaisir de voir avancer un groupe que l'on suit dès l'origine, et qui prouva ici sa capacité à assumer un niveau supérieur. Une reprise finale des Beastie Boys "Fight for Your Right", sur un rythme plus rapide que le mythique original, laissera des traces sur la fesse des baigneurs imprudents !

HATESPHERE se présenta sur la scène intérieure au son du générique d'"Amicalement vôtre". J'avais vu ces vieux dinosaures du Thrashcore il y a une douzaine d'années, sous une formation quasi entièrement différente. Rares sont les survivants de ce mouvement. Les Danois jouent désormais sur la bonne humeur, le chanteur tout sourire s'employant à blaguer sur la bonne bière française, avec un bracelet tricolore et autres amabilités scéniques bien connues. Ils se contentaient d'un son étonnamment faiblard et sale pour un groupe aussi expérimenté. À leur stade ils ont certes atteint un certain objectif, mais aussi renoncé à certaines choses… Aimant bien ce style bourrin et direct qui était à la mode quand je découvris le Metal, j'y ai évidemment trouvé mon compte même si Hatesphere n'a jamais atteint la qualité de PanterA.

Les Australiens de CLOWNS ont rapidement percé en trois albums, la jeunesse se trahissait par des dégaines fluettes et des chevelures massives. Ne craignant pas le soleil baissant, ils ont envoyé avec énergie un Punk Pop à l'américaine, façon Ramones ou MC5 en short et Vans. Le chanteur à lunettes noires catalysait ce cratère de pulsion vitale… Peu amateur de ce style, j'en ai profité pour faire une pause courses aux stands, plus nombreux que l'an dernier ; et un aller-retour à la voiture pour me débarrasser. Il y avait Season of Mist, une paire de disquaires indépendants bien achalandés, des bijoux, des accessoires divers pour coquettes. Quand je revins, Clowns attaquait une montée chromatique adroite et longue pour leur genre, que la fosse semblait apprécier.

Il y a six mois à peine j'avais savouré près de là le retour de NOSTROMO, invité par Gojira sur sa tournée française. Pas de grande différence, et il n'aurait manqué que cela ! Leur HC Grindy est décidément aussi sec et puissant que sur album, transcendé par une double autant présente et chirurgicale que dans le meilleur Death Brutal. Une seule guitare, grave, sèche, pleine et velue, suffit largement. Cette fois Xavier abandonna sa casquette vue la chaleur, mais occupait toujours tout le terrain central de la scène de son large pas, envoyant son micro filaire comme un fléau au-dessus de sa tête, son timbre rogue collant parfaitement à l'austère brutalité du propos. Sa communication est sobre, dans l'esprit du reste, mais aimable. À la Suisse. Le répertoire commence à s'enrichir et nous eûmes au moins un titre nouveau, qui ne troublera pas les anciens fans. Nostromo se distinguera toujours par ce goût constant pour l'expérimentation raisonnée, donnant une saveur unique à son HC new-school à la base si typée, si tannique : l'emploi d'instruments exotiques (ici samplés) ou de bidouillages furtifs intrigants est une marque, c'est la dimension spéciale des Genevois. Une reprise incontournable des amis disparus de Nasum se glissait en cours de set, avant de clore à nouveau sur la classique et remarquable régurgitation de Napalm Death, "Twist the Knife" dont le style singulier donne la piste de ce que cherche à faire Nostromo.

Dehors FACE TO FACE prit le relais… Dire qu'à une époque le HC mélodique récréatif était un style réservé aux grands adolescents, les quatre membres ne sont plus de première jeunesse. Et pourtant, le chanteur case le mot "cool" à chaque virgule. Le quartet empila les tranches avec une efficacité certaine sur un rythme assez souple. Comme quoi Michel Tournier a raison, nous avons chacun un âge de la vie après lequel on court pour ensuite s'y maintenir au mieux tout le restant de ses jours… Sur ces considérations j'allais faire la queue pour dîner et recharger ensuite un verre, la soirée était loin de sa fin et l'attente aux food trucks rallongée, car il y en avait un de moins que l'an dernier. Le set, assez long lui aussi puisqu'on arrivait aux têtes d'affiches, laissait au surplus le temps de blaguer avec quelques connaissances avec cette galopade en bruit de fond. Face to Face doit être connu dans le style, même si ce nom ne me disait rien, et il faut y reconnaître un certain savoir-faire même sans passer la cinquième.

SEPTIC FLESH a galéré en début de set avec un faux contact qui a compressé le son au milieu du premier titre, et n'a été réglé qu'au troisième. De quoi justifier une certaine nervosité et le passage fréquent des membres derrière les tentures tendues à l'arrière. À ce sujet je regrette qu'un groupe qui avait naguère une réelle identité visuelle se soit finalement rabattu sur une imagerie banale. Et les costumes en fausse peau de reptile n'ajoutent pas grand'chose. Le Death Metal orchestral des Hellènes ne change pas, même si j'ai décelé un resserrement sur la seconde période d'activité et ses titres plus simples mais indéniablement puissants, valorisés par une production forte, ample, opératique comme ils disent en Grèce pour nommer ce courant. Un fan plus pointu pourrait vous dire s'ils ont donné des titres de l'album qui doit sortir prochainement. En tout cas il y a eu pas mal de "Communion". La déferlante sonore, les pompes orchestrales et la présence du groupe autour de Spiros, avec leurs grands gestes, faisait oublier que ça ne jouait pas très carré. Et si ça peut surprendre, cela n'a pas beaucoup d'importance pour un live, dans ce style, qu'ils ont largement défriché avant tout le monde.
Après tout il y a peu de groupes qui marient un Death pur avec une musique orchestrale et, même si je n'aime pas forcément tout (il y a eu encore ce titre horripilant qui reprend le motif de "Requiem for a Dream"), Septic Flesh y apporte une âme, une part de beauté totalement absente chez certains groupes Italiens dont je tairai le nom.

La nuit étant bien tombée à cette heure, GOOD RIDDANCE attendait pour le dernier passage sur la scène extérieure, dans un rafraîchissement appréciable en harmonie avec cette dernière tournée de Punk sur roulettes. Pour couronner le parcours, c'était vraiment parfait. C'est l'une des plus typiques incarnations du HC mélodique Californien, signé sur Fat Wreck, enfilant gaillardement des titres à la course pour le bonheur des pogoteurs, avec un tempo il est vrai plus rapide que celui de Face to Face. Vous l'aurez deviné, sentant un léger épuisement j'ai préféré aller me reposer un peu et revoir quelques personnes avant que la journée se termine, puisque c'était la seule pour moi.

CARCASS honorait sa promesse de venir cette année, après avoir annulé en 2016 au profit d'une tournée Américaine. Et bien que ce soit l'un des groupes de Metal extrême que j'écoute le plus anciennement (plus de vingt ans), je n'avais jamais réussi à les voir malgré la reformation. Depuis 2007, aucune apparition dans le Sud de la France ; et je n'avais pu me déplacer à l'automne 2015 pour profiter de l'une des trois dates les plus proches de la tournée Deathcrusher.
Vous mesurez donc l'émotion un peu bête qui me saisit dans les premiers instants, elle devient rare après des lustres à parcourir les scènes : la lampe blanche, l'intro "1985" qui monte et le groupe qui entrait sous les acclamations d'un public toujours pas fatigué… C'était la première fois que j'entendais en live des riffs que je connais pourtant depuis si longtemps, qui ont dressé mon goût dans l'extrême. Balayée, la lassitude d'un marathon sonore !
Comme d'autres vieux briscards, Carcass enchaîne sans pauses ou quasiment, ne laissant pas le temps de souffler et casant intelligemment rapidement des titres comme "Buried Dreams" et "Incarnated Solvent Abuse" pour confirmer qu'on allait aborder presque tous les sujets. Les intros parlées de "Necroticism…" étaient bien là. À mesure que le set avançait, malgré une lucidité brouillée par le plaisir et le train des enfilades impitoyables, on remarquait que bien des titres étaient tronqués ici ou là, et des bouts d'autres greffés sur l'ensemble.
Je considère depuis longtemps que le Heavy est présent chez Carcass depuis le deuxième album en réalité, et c'est logiquement cette identité que le groupe a choisi pour jamais. Cela s'est confirmé dès le retour avec "Surgical Steel", et aussi dans le recours aux applaudissements en rythme, typiques de la scène Heavy, que Jeff Walker nous a faits faire même avec de forts anciens morceaux, de manière un peu incongrue. Et logiquement "Reek of Putrefaction" (l'album et non le titre, qui a été joué) reste écarté de la setlist, au grand dam des purs grindeux.
Les qualités de guitariste de Bill Steer ne sont plus à rappeler, malgré quelques facilités sur les solos, sa réserve concentrée mais très relâchée est la marque des grands. Il est bien moins marqué par l'âge que Jeff Walker, qui n'en a pas pour autant perdu de l'énergie dans ses vocaux qu'il assura quasi intégralement vu le répertoire choisi. Carcass est appréciable aussi pour l'humour purement anglais qui se dégage de toutes les paroles, bien que Jeff soit moins sarcastique en scène. Le français qu'il maniait trahit plus un trop long manque de pratique qu'une totale méconnaissance… ("but Bill is fluent !" prétendait-il !).
Ben Ash, l'inconnu qui a remplacé Mike Amott depuis le dernier album restera ma foi exempt de tout reproche, comme Dan Wilding (c'est de loin le cadet, on se croirait chez Sepultura) dont j'ai apprécié le jeu percutant, et un peu plus chaleureux que celui du regretté Ken. Après un dernier greffon des ultimes mesures de "Carneous Cacoffiny", le groupe s'éclipsa assez vite sur la reprise téléphonée de "1985" dans les enceintes, vue l'heure et l'impératif d'un autre festival le lendemain en Angleterre. Finalement, Carcass est notablement meilleur actuellement que les quelques extraits vidéos et reports datant des débuts de la reformation, les réserves sont désuètes et caduques, pour peu qu'on accepte ce qui est depuis 1993 : c'est d'abord un groupe de Death Heavy mélodique et assez Rock, parfois plus brutal sur de vieux titres, mais le reste n'est plus pour eux qu'un vieil accessoire faiblement assumé.

Il n'y avait plus qu'à rentrer, fourbu mais comblé par une intense journée, dans la nuit apaisante et la bonne humeur générale, jusqu'à la voiture puis l'hôtel. Cette année, pas de déluge. Nous nous retrouverons à la rentrée pour un rendez-vous historique.